Les avantages liés à la ratification de l’Accord relatif aux mesures du ressort de l’État du port (ou PSMA)
Pourquoi les pays devraient se rallier à leurs voisins dans la lutte mondiale contre la pêche illégale
En bref
La pêche illicite, non déclarée et non réglementée (INN) contribue à la surexploitation des stocks de poissons, nuit à leur reconstitution et provoque de lourdes pertes financières, notamment pour les États côtiers en développement dont l’économie dépend largement de la pêche.1 Les activités de pêche illégale s’accompagnent également souvent d’autres infractions pénales, telles que l’évasion fiscale, le blanchiment d’argent, la contrebande2 et la violation des normes de travail,3 qui constituent autant de problèmes supplémentaires.
L’Accord PSMA, dont le nom officiel en français est « l’Accord de la FAO relatif aux mesures du ressort de l’État du port visant à visant à prévenir, contrecarrer et éliminer la pêche illicite, non déclarée et non réglementée »4, est un outil à moindre coût et efficace pour lutter contre la pêche INN. Les contrôles dans les ports sont moins onéreux et plus sûrs que le repérage, l’arraisonnement et l’inspection des navires en mer. De même, les contrôles découragent plus volontiers la pêche illicite en rendant plus difficile la vente de poissons capturés illégalement. Plus le nombre de pays appliquant le traité et harmonisant leurs mesures liées à l’État du port sera important, plus la pêche illicite, non déclarée et non réglementée sera une activité risquée et peu rentable. Tel est l’objectif ultime visé par la FAO avec le PSMA.
Ratifier cet accord international et mettre en œuvre efficacement les mesures de l’État du port représentent certainement un coût, mais apportent également de nombreux bénéfices économiques directs et indirects. Le principe de coopération est la pierre angulaire du PSMA. Les bénéfices pour chaque nation augmenteront avec le nombre d’États signataires. Les États ont certes dû modifier quelque peu leurs politiques pour mettre en œuvre les prescriptions du PSMA, mais une récente analyse montre que celui-ci est source de bénéfices réels pour les États qui l’ont ratifié. L’efficacité et l’impact du PSMA se renforceront au fur et à mesure que le nombre de ratifications augmentera à la fois au niveau régional et des États voisins.
Les avantages économiques de l’Accord PSMA
- Accès au marché. En ratifiant le PSMA, les États du port démontrent à la communauté internationale qu’ils prennent à cœur leurs responsabilités. Cette simple démarche donne lieu à l’une des mesures incitatives les plus importantes en faveur de la ratification de l’Accord. En appliquant les premières prescriptions du PSMA en vue de préserver leurs ports nationaux des captures illicites, ces États s’assurent un accès ininterrompu aux marchés importants. De plus en plus de pays (ainsi que leurs revendeurs) s’approvisionnant en produits de la mer ont pris fait et cause pour l’arrêt de la pêche illicite, non déclarée et non réglementée. Dès lors, les États du port qui ratifient le PSMA ont un avantage sur ceux qui ne l’ont pas encore fait. De fait, ces États préféreront utiliser les ports des pays signataires du PSMA. Cela devrait stimuler la demande et accroître les recettes par une recrudescence des activités et des dépenses dans les ports, mais aussi par le développement des secteurs connexes.
- Soutien financier aux États en développement en vue de la mise en œuvre du PSMA. L’Article 21 du PSMA5 prévoit que les pays en développement peuvent obtenir de l’aide afin de renforcer les capacités indispensables pour mettre pleinement en œuvre le traité. En vertu de l’Accord, les parties établissent un groupe de travail ad hoc afin de créer un fonds et mobiliser le soutien en faveur du développement des capacités. Cette aide financière des parties signataires peut être utilisée pour mettre sur pied le système de mesures de l’État du port, l’intégrer aux systèmes nationaux et régionaux de suivi, de contrôle et de surveillance, élaborer des procédures de contrôle et former les fonctionnaires ainsi que d’autres autorités du port.
- Meilleure gouvernance du secteur de la pêche et coopération plus efficace entre les administrations. La mise en œuvre du PSMA exigera des administrations publiques des pays qui ont ratifié l’Accord une coordination des procédures, ce qui sera pour certains une grande première. Le traité prévoit un cadre de gestion des activités entre les différentes administrations, avec à la clé un gain de temps et d’argent. Il permettra également de développer les efforts de coopération entre les États. Ensemble, ces mesures devraient apporter d’autres bénéfices, comme le meilleur respect des lois du travail, de l’immigration et de la santé. La coopération entre les administrations peut également stimuler la transparence, limitant ainsi les possibilités de corruption.
- L’intégration des mesures relatives à l’État du port améliore les systèmes de suivi, de contrôle et de surveillance. L’utilisation d’informations recueillies systématiquement lors de contrôles au port peut réduire les coûts globaux de l’évaluation nationale des risques liés aux ports et aux systèmes de suivi, de contrôle et de surveillance. Une meilleure intégration devrait permettre de réduire le temps, les efforts et les ressources nécessaires au suivi, à l’arraisonnement et au contrôle des navires en mer. Effectués au port, les contrôles sont plus sûrs et moins onéreux que les moyens aériens et terrestres classiques de répression.
- Collaboration régionale. Parce qu’il privilégie la collaboration entre les régions et les États, l’Accord PSMA fixe un cadre pour le partage d’informations et la coopération. Les pays signataires ont l’obligation d’améliorer la transparence de leurs procédures de conformité, par le recueil et le partage des informations entre différentes juridictions. Ces mesures doivent permettre à tous de tendre vers la fermeture des marchés aux captures illégales de poissons. Lorsqu’une région entière applique le PSMA, le débarquement de produits de la mer issus de la pêche INN présente moins d’intérêt sur le plan économique, voire devient impossible pour les navires se livrant à la pêche illégale. Le renforcement de la coopération régionale améliore également la capacité des États côtiers à mettre en œuvre efficacement les accords d’accès, ce qui permet aux pays tiers d’acheter des droits de pêche aux États dont les ressources sont sous-utilisées dans leurs zones économiques exclusives.6 Cela est d’autant plus important pour les espèces hautement migratrices et les stocks surexploités.
- Gestion durable des ressources de pêche. La gestion des ressources de pêche, notamment des espèces migratrices, peut être améliorée par une meilleure information sur l’historique et les activités des navires se livrant à la pêche illégale, plus généralement sur les espèces qui peuvent être capturées et débarquées, ainsi que par un meilleur recoupement des données avec d’autres ports. Les informations recueillies via un système de suivi, de contrôle et de surveillance permettent d’effectuer des évaluations plus fiables et renforcent la surveillance globale des eaux nationales et adjacentes, ainsi que celles des eaux au niveau international.
- Plus grande attractivité des investissements dans le secteur de la pêche. Le renforcement de la réputation d’un État du port comme étant respectueux de la loi et transparent peut stimuler l’investissement étranger en provenance d’États autorisés à pêcher dans la zone économique exclusive d’un État côtier. Ceci peut contribuer à développer la flotte nationale d’un pays, et ainsi à stimuler ses activités portuaires telles que les approvisionnements divers, la réparation, la transformation et les services complémentaires.
Conclusion
Cette liste présente les avantages que les pays peuvent attendre d’une adhésion à l’accord PSMA, ralliant ainsi leurs voisins. Les États qui n’ont pas encore fait ce choix devraient le ratifier dès que possible afin de contribuer à éloigner de leurs ports les opérateurs se livrant à la pêche illégale. Plus le nombre de parties augmentera, plus cet accord clé pour la lutte contre la pêche INN aura d’impact.
Notes
- Reg Watson et Daniel Pauly, « Systematic Distortions in World Fisheries Catch Trends » letter, Nature 414 (2001) : 534–36, http://www.nature.com/nature/journal/v414/n6863/full/414534a.html ; Daniel Pauly et al., « The Future for Fisheries », Science 302, no. 5649 (2003) : 1359–61, http://science.sciencemag.org/content/302/5649/1359.full ; David J. Agnew et al., « Estimating the Worldwide Extent of Illegal Fishing », PLOS ONE 4, no. 2 (2009) : e4570, http://dx.doi.org/10.1371/journal.pone.0004570 ; et Boris Worm et al., « Rebuilding Global Fisheries » Science 325, no. 5940 (2009) : 578–85, http://science.sciencemag.org/content/325/5940/578.full
- United Nations Office on Drugs and Crime, Transnational Organized Crime in the Fishing Industry (2011), http://www.unodc.org/documents/human-trafficking/Issue_Paper_-_TOC_in_the_Fishing_Industry.pdf.
- U.S. Department of State, Trafficking in Persons Report (2015), http://www.state.gov/j/tip/rls/tiprpt/2015/index.htm.
- Accord de la FAO relatif aux mesures du ressort de l’État du port visant à visant à prévenir, contrecarrer et éliminer la pêche illicite, non déclarée et non réglementée, 2009, http://www.fao.org/fishery/psm/agreement/en.
- Ibid.
- Marcos A. Orellana, Towards Sustainable Fisheries Access Agreements: Issues and Options at the World Trade Organization, United Nations Environment Programme (2008), http://www.unep.ch/etb/publications/FS%20Access%20Agreements/Inside%20FS%20Access%20Agreements.pdf.