La Commission internationale pour la conservation des thonidés de l’Atlantique (CICTA) est responsable de la conservation et de la gestion des thons, des requins et d’autres espèces hautement migratrices dans l’océan Atlantique. Lors de leur réunion annuelle de novembre, les membres de la CICTA devront s’attacher à honorer le mandat de la Commission et à assurer la pérennité de ses précieuses ressources halieutiques.
The Pew Charitable Trusts demande aux membres et aux non-membres coopérants participant à la 21e réunion spéciale de la CICTA de prendre les mesures essentielles suivantes :
L’évaluation des stocks de thon obèse de l’Atlantique réalisée au cours de l’année a établi que la population est seulement à 59 % de son niveau durable, ce qui est pire qu’au moment de l’adoption par la CICTA de son premier plan de reconstitution en 2015. Ce plan lacunaire avait bien peu de chances de réussir ; il n’a fait que retarder le processus de reconstitution et le rendre encore plus difficile. Qui plus est, la surpêche s’est poursuivie avec la même intensité, les captures de 2017 ayant dépassé de 21 % le total admissible de captures (TAC).
La CICTA doit adopter un plan qui ait au moins 50 % de chances de mettre fin à la surpêche immédiatement et 70 % de chances de reconstituer les stocks fortement réduits au plus tard en 2028. Pour y parvenir, la Commission doit abaisser le TAC à 50 000 tonnes métriques, régler le problème des dérogations des petits exploitants afin que le total réel n’excède pas le TAC et réduire la mortalité juvénile associée à l’utilisation de dispositifs de concentration des poissons (DCP) en vue d’aider à rétablir la productivité des stocks. Le calendrier de reconstitution ne doit pas être prolongé au-delà de l’objectif initial de 2028, car cela serait inapproprié compte tenu du cycle biologique du thon obèse et des exigences établies dans la recommandation 11-13.
Depuis six ans, la CICTA travaille à une série d’amendements visant à moderniser le texte de la Convention pour l’aligner sur les conventions des autres organisations régionales de gestion de la pêche (ORGP) au niveau mondial. Cette année, la CICTA doit adopter sans tarder les recommandations finales du groupe de travail afin de permettre la signature des amendements définitifs et la poursuite du processus de ratification.
En 2017, la CICTA a adopté sa première règle d’exploitation découlant de l’évaluation des stratégies de gestion (ESG). Pour poursuivre cette avancée et respecter le calendrier de cinq ans établi dans la recommandation 15-07, la Commission doit renforcer le mandat du Groupe de travail permanent dédié au dialogue entre halieutes et gestionnaires des pêcheries, afin de clarifier le rôle, les tâches et la structure organisationnelle du groupe en vue d’améliorer son efficacité. De même, des informations doivent être ajoutées à la feuille de route pour le développement d’évaluations de stratégies de gestion et de règles d’exploitation, afin de clarifier les responsabilités des différents groupes et les calendriers associés des travaux et décisions. Étant donné qu’il est prévu de définir une procédure de gestion pour les stocks de thon rouge de l’Atlantique en 2020, la Commission doit également adopter des objectifs de gestion provisoires pour ces stocks.
Lors de la révision des dispositions de la recommandation 17-07 ne portant pas sur le TAC, la Commission doit suivre les conseils de 2018 du Comité permanent pour la recherche et les statistiques qui préconisent de ne pas affaiblir les mesures actuelles de suivi et de contrôle, afin d’assurer la pleine reconstitution de la population et le respect du TAC1. Surtout, des limites portant sur la capacité de pêche et d’aquaculture doivent être établies de façon à demeurer proportionnelles aux quotas. En outre, pour empêcher une activité excessive ou un dépassement des quotas, la Commission doit conserver les limites actuelles concernant la taille minimum et les périodes de pêche à la palangre pélagique, à la senne coulissante et au chalut pélagique, ainsi que la définition actuelle des captures accessoires qui limite la rétention des thons rouges à pas plus de 5 % des captures totales pour les navires qui ne ciblent pas le thon rouge. Des dispositions doivent également être ajoutées pour faciliter la transition vers une procédure de gestion découlant de l’évaluation des stratégies de gestion (ESG) en 2020.
Pour s’assurer que les captures des palangriers et des senneurs soient vérifiables et légales, et pour accroître la qualité et la disponibilité des données scientifiques, la Commission doit exiger la présence d’observateurs dans 100 % des palangriers et des senneurs, et s’engager à mettre en place l’infrastructure nécessaire pour réussir l’implantation du signalement et du suivi électroniques.
Des règles de transbordement claires sont essentielles pour obtenir une chaîne d’approvisionnement des produits de la mer solide, légale et vérifiable, mais également pour freiner les activités illégales. Pew demande l’interdiction du transbordement en mer dans la zone de la Convention jusqu’à ce que les bonnes pratiques exposées ici soient mises en œuvre.
La recommandation 16-15 doit être actualisée de façon à exiger que les navires-transporteurs battent pavillon d’une partie contractante de la CICTA, ou d’une partie, entité ou entité de pêche non contractante coopérante (collectivement nommées CPC) pour être autorisés à transporter des thons et des espèces apparentées. De plus, la Commission doit exiger que toutes les autorisations et déclarations de transbordement soient envoyées en temps quasi réel à toutes les autorités concernées, exiger que les navires-transporteurs ayant l’intention de transborder en avisent le secrétariat lorsqu’ils pénètrent dans la zone de la Convention et s’assurer que tous les navires qui font du transbordement soient obligés de faire monter à bord des observateurs chargés de fournir des rapports sur tous les transbordements directement au secrétariat. Enfin, elle devrait exiger que les produits transbordés provenant des eaux de la CICTA, mais débarqués en dehors de la zone de la Convention soient obligatoirement accompagnés des déclarations de transbordement jusqu’au premier point de vente.
La pêche illicite, non déclarée et non réglementée demeure une menace dans la zone gérée par la CICTA. Pour empêcher plus efficacement les captures illégales d’entrer sur le marché, Pew encourage la Commission à adopter un amendement à la recommandation 12-07 qui améliorera la cohérence avec l’Accord relatif aux mesures du ressort de l’État du port de l’Organisation des Nations uniespour l’alimentation et l’agriculture, comme recommandé dans la seconde évaluation indépendante des performances de la CICTA. Les travaux du groupe d’experts en inspection au port pour le renforcement des capacités et l’assistance doivent également se poursuivre afin d’aider à la mise en œuvre des mesures du ressort de l’État du port de la CICTA.
Les systèmes de surveillance des navires (VMS) sont des outils puissants couramment utilisés pour suivre les navires de pêche autorisés et déterminer si leurs activités respectent les obligations, notamment concernant les autorisations de pêche ou les fermetures spatiotemporelles. LA CICTA devrait étendre ses exigences en matière de système VMS à toutes les espèces gérées afin de mieux aligner les procédures avec celles déjà en place pour le thon rouge de l’Atlantique Est.
La recommandation 2013-13 exige que tous les navires d’au moins 20 mètres de longueur et les navires pêchant des thons rouges de l’Atlantique Est possèdent un numéro de l’Organisation maritime internationale (OMI). Cependant, la mise en œuvre de cette recommandation demeure incomplète. Toutes les CPS doivent s’assurer que cette obligation est pleinement respectée.
En décembre 2017, l’OMI a étendu l’admissibilité à un numéro unique à tous les navires de pêche motorisés, y compris ceux en bois, de 12 mètres de longueur et plus qui sont autorisés à pêcher en dehors des eaux sous juridiction nationale d’un État du pavillon. Pew encourage la Commission à retirer l’exclusion concernant les navires en bois de la recommandation 2013-13 et à actualiser ses Directives pour la transmission des données et des informations requises de façon à exiger un numéro OMI pour tous les navires admissibles.
La CICTA doit mieux protéger les espèces de requins menacées, et toutes les captures de requins effectuées dans la zone de la Convention doivent être durables. La Commission doit appliquer le principe de précaution en adoptant des mesures de protection des espèces de requins parce que les données sur ces populations sont souvent limitées. Le manque de données de qualité rend les évaluations non fiables et non concluantes.
Lors de l’adoption l’an dernier de la recommandation 17-08 concernant le requin-taupe bleu, la Commission n’a pas pris les mesures de précaution nécessaires pour permettre la reconstitution de ces stocks fortement réduits. Les nombreuses dérogations figurant dans cette recommandation nuisent autant à sa mise en œuvre qu’à son efficacité2. Les meilleures données scientifiques disponibles indiquent que la rétention du requin-taupe bleu doit être totalement interdite pour permettre aux stocks de se reconstituer. La Commission doit également établir des limites de capture préventives concrètes pour protéger le requin bleu de la surpêche.
Bien que la CICTA poursuive ses avancées vers une gestion fondée sur des données scientifiques par l’élaboration de stratégies de pêche et l’amélioration potentielle des amendements à la Convention, il reste beaucoup à faire pour assurer une pêche durable dans l’Atlantique. En mettant en œuvre ces recommandations, la Commission ferait un pas important vers le respect de son mandat de gestion durable et scientifique des précieux stocks de poissons.